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- Symétries Inversées -

17 février 2008

- Aussi loin qu'un murmure -

Nous Faudra-t-il fuir aussi loin qu’un murmure

Pour retrouver serein, les couleurs d’écorchures,

Sur les mains La violence des Mensonges.

Douces caresses

Fais un songe.

Et sous les lampes aux teints jaunes, on perçoit

Les odeurs des cheveux fraîchement taillés Et si court,

Si court qu’accroche toi à ton rire pour ne pas tomber.

Mais le monde est renversé et on aperçoit les araignées,

Le long des plaintes/Fuit !

Fuit aussi loin qu’un murmure, Fuit comme la goutte/Fuit !

Et revêt ton armure, les plumes se sont cassées/Fuit !

Ton ombre sur la plainte s’est dressé/Fuit !

Au côté des insectes, il nous faut convoiter

Ce côté de l’arrête, y construire une enceinte/Reste !

Et murmurer enfin, que c’est ici, que le chemin s’arrête/

Et continu le son, encore/dresse l’oreille. L’entends tu ?

L’entends tu ? Dans le vide il se perd, et suit le.

Essuie le de ta manche, comme une goutte sur ton front

Il est en toi. Etends toi. Par le son du murmure, Au-delà des

Murs d’enceintes. Etends toi ! Fuit !



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15 février 2008

- Mais ou vont donc les cafards ? -

La baraque était vie quand je me suis levé. Le café était chaud. Ma copine est une fille merveilleuse. J’ai traîné à poil dans les pièces. En silence. Ecouter de la musique ne me prédisait rien de bon en ce moment. Rapidement je m’énervais. Je ne trouvais rien qui me transcende. Rien qui me tire de cet état à la con. J’étais vautré dans une paresse et tout ca me coulait sur la peau comme une sueur épaisse et grasse. Des semaines que je trouvais rien qui ne vaille le coup d’être entrepris. Des semaines que je ne faisait rien. J’ai ouvert les volets et un soleil jaune pisse a versé l’ensemble de ces rayons dans mes yeux. J’ai tout fermé. J’ai allumé une clope. Je m’étais mis à haïre le soleil. Il ferait beau, il disait à la radio. Il ferait beau… Le soleil n’a plus rien de beau. Il cogne tellement fort qu’on croirait une chape de béton sur un champ de marguerites. Ces millions de petits bras lumineux sont des vicieux. Ils éclairent tout. Vraiment tout, jusque dans les endroits les plus obscures, jusque dans les endroits qui devraient rester dans l’ombre. Le soleil est un psychanalyste féroce. Un médecin complément fou qui OBLIGE le monde entier à regarder en face toute la merde que l’on est capable de produire. Il ne prends pas la peine de mettre des gants, il vous plonge la tête dans les chiottes en vous disant « alors ça vous plais ? ». Avec lui, la discrétion n’existe plus. Avec lui, plus un endroit où se cacher, plus un endroit de viable. Mais ou vont donc les cafards ?

 

14 février 2008

- AutoBloquant -

J’avais rien de spécial à faire ce jour là, tout au plus une partie d’échec dans un rade. L’enjeu était d’une tournée alors, pourquoi ne pas tenter le coup ? La fac entamait tranquillement sa seconde semaine de fermeture administrative, mais ça me bouleversait pas plus que ça. A vrai dire, j’étais plus déterminé à gagner la partie qu’à faire la révolution. J’avais lu Mao et certains passages m’avaient même parus censés. Cependant, j’étais bien trop douillet pour me frotter à un car de CSR, même sous couvert de révolution, fusse-t-elle culturelle.

  Toujours est-il que je suis arrivé un peu en avance. Le troquet était vide, y’avais juste cette nana au comptoir. J’ai envoyé un signe de tête à Kenny (c’est le barman), et j’ai pris un siège à côté de la fille. J’avais beau ne rien avoir à faire ce jour là, je ne perdais pas totalement la tête. En plus, je venais de revoir les premiers John Waters alors mes idées s’accumulaient un peu n’importe comment. Elle était jolie et on a échangé deux ou trois regards avant de se décider à causer :

-Tu profites des grèves, toi aussi, elle m’a fait.

-Y’a un peu de ça ouais.

 Bon, ça volait pas bien haut, et il faut reconnaître que tout paraît beaucoup plus facile quand on regarde John Waters. Rapidement, elle s’est mise à me parler politique. J’étais pas plus fan que ça alors j’ai pas écouté grand chose. J’ai simplement compris qu’elle était pro-blocage, de gauche, jolie, qu’elle avait aimé lire Marx, célibataire, qu’elle ne comprenait pas pourquoi « dans ce pays personne ne croit plus en la révolution ! » et qu’elle préférait manger italien que mexicain –rapport à la digestion. Dans l’absolu ces histoires de blocage et de non blocage je n’ai jamais su quoi en penser alors, je me contentais d’hausser les épaules un peu bêtement. Et puis, venu d’a peu près nul part. Enfin si, venu directement de sa bouche mais sans crier gare, elle a balancé cette bombe :

-Et toi, le blocage, t’en penses quoi ?

 Putain, mais, c’est pas des questions à me poser ça ! Qu’est ce qui tourne pas rond chez cette fille ? La plupart du temps, je sais même pas s’il faut supporter les bleus ou les blancs ! Même choisir, un cd c’est une épreuve, alors prendre position politiquement…

J’ai essayé de baratiner deux trois conneries pour donner au change, mais je suis pas sûr que ça l’ai impressionné plus que ça. J’ai balancé des trucs du genre :

-Tu sais moi, la politique. Enfin, je pense qu’être pour… enfin qu’être contre… C’est un peu une histoire idéologique. Je veux dire que c’est avant tout une idéologie. Faut être ancré quelque part politiquement, pour avoir une opinion arrêtée sur ce genre de question. Enfin, tu vois, ça engage vachement plus que le simple fait de lever la main quand le type demain si on est pour le blocage. En soit j’ai rien contre, comprends moi bien, j’ai rien contre le blocage, mais j’ai rien contre non plus le fait d’être contre le blocage. Tu me suis ?

Elle a rien dit alors j’ai continué :

-Le simple fait de lever la main, en définitif ça engage bien plus que ton corps, c’est tout une fac, c’est une mini société quelque part. C‘est politique comme choix. Et je pèse mes mots, je te jure… En fait, je crois que je suis contre l’idéologie avant même d’être pour ou contre. Parce que, tu vois, je crois que l’idéologie c’est une idée qui prend tellement de vigueur qu’elle apporte de la violence. Ouais c’est un truc comme ça l’idéologie c’est une idée qui devient violente, exclusive et narcissique. C’est une idée qui croit, à tord, qu’elle a, en elle-même, le statut d’Idée Génial !Ce qui est, à mon sens, une pure connerie. Alors peut être qu’effectivement, je suis plus con que la moyenne, mais je m’estime pas assez costaud pour pouvoir faire un choix pareil. Alors si y’en a qui peuvent tant mieux, je suis vraiment heureux pour eux. Mais moi, je peux pas faire ce genre de choix. Je suis un type assez douillé intellectuellement. Franchement !

Elle avait fini sa pinte et me regardait un poil trop haut :

-Et finalement t’en penses quoi du blocage ?

J’ai soupiré et je suis tombé nez à nez avec son improbable décolleté alors j’ai dis que « Ouais, ouais,  je suis  pour, le blocage, je suis pour, évidemment, quoi d’autre ? »

 Là dessus, mon pote est arrivé. On a joué, j’ai perdu.

 

14 février 2008

- Dans la ville -

On a beau y ramper
Y enseigner l’esquive
On ne fait que passer
Entre les ronces des sylves


14 février 2008

- Ecorché -

Nous voilà écorché
Par les dents d’un Ver sale
Qui sous les lames du palais
S’éprenait pour le mal

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14 février 2008

- Sous les néons (Partie a) -

Oh la vache la vache la vache !!!

 Il a tourné la tête vers moi et je me suis planqué dans le rayon bio.

Oh la vache la vache la vache !!!

 J’ai fais semblant de m’intéresser à un riz équitable hors de prix. J’ai rarement vu un type qui dégage ça. Merde, comment c’est possible de faire des trucs comme ça avec des yeux ? Pourquoi je rencontre toujours des types dans des endroits glauques ? Néons, cadis, produits dégueus dans tous les sens. Société de consommation de merde !

Tu serais né dans une société de chasseur cueilleur, c’est dans la forêt que tu l’aurais traqué ton mec. Ca aurai eut une autre gueule quand même.

Je l’ai suivi dans le rayon des brosses à dents. Il en a pris une bleue et rouge avec tête rotative et brosse à langue. Sophistiqué : j’adore. J’ai imaginé sa langue et sa bouche, je mouillais carrément. La vache ! J’ai pris un truc pas cher pour me calmer et je me suis envoyé tout le rayon surgelé pour être sur de pas lui sauté dessus. Il y a certaines situations qu’il ne faut pas sous-estimer. On peut jamais être complètement à l’abri des ces pulsions embarrassantes. Vous savez, celles qui vous malmènent par le bout du nez. Je me sentais comme une ânesse, avec le cul de ce type comme carotte. Parole. Je l’ai rattrapé dans un rayon de truc de conserve.

Trouve un truc intelligent à lui dire, trouve un truc intelligent à lui dire !!!

Lui parler, lui parler. Calmement, ça va bien se passer. T’en a vu d’autre aller, accroche toi. Compte jusqu’à trois…

Respire…

Voiiiilà. Calme toi…

Respire…

-Salut. Ca roule ?

C’est con ce que tu dis là, complètement con… Trouve autre chose. Vite. Je réfléchissais à toute allure entre les conserves de maquereau et les boîtes de thon. Putain d’odeur, j’arrivais pas à me concentrer sur un truc intelligent. Merde merde merde…

Respire…

J’ai croisé tous mes doigts entre eux et j’ai eut un mal de chien à les démêler. L’odeur de poissons me prenait à la gorge et je respirais à toute vitesse pour réussir à chopper un peu d’air sain. J’étais dans un état pas possible, mes mains étaient sèches comme des bambous. Je n’arrêtais pas de les tordre comme une damnée.

-Ca va oui. Tu cherche un truc ?

Oh la vache, oh la vache. Il me parle. Vite vite répond. Aller !

-Euh non ! non, je cherche rien de spécial. Je fais mes courses, voilà tout. Enfin, tu vois bien que je fais mes courses. Hein ? Oui enfin je veux dire on est dans un super marché. Quoi d’autre ?

Putain, t’es nulle.

-Ok.

Il se casse Il se casse rattrape Le ! bouge tes fesses !

 A partir de ce jour, j’ai détesté les magasins de bouffe : mes talons claquaient à toute vitesse sur le carrelage et la roue de mon cadi couinait sans arrêt. TAC TAC COUIC TAC TAC COUIC TAC TAC COUIC.

Arrête le massacre Julie arrête.

TAC TAC COUIC TAC TAC COUIC

tout le monde te regarde ma fille arrête tout de suite. Tu vas pas courir derrière un Type dans un super marché. Quand même…

 Et bien si ! J’ai balancé mes talons dans le cadi et j’ai laissé le chariot en plein milieu de l’allée.

-Attends ! Attends ! S’il te plaît, attends un peu.

 J’ai rattrapé le mec devant le rayon de lingerie.

Qu’est ce qu’il fout là ? Peut importe. Concentre toi ma vieille, concentre toi.

-Euh oui attends. En fait si. D’accord, ok, je cherche quelque chose. Alors voilà, je cherche à attirer ton attention. Ouais, voilà, tu me plais.

 C’est après coup, que j’ai réalisé que c’était un peu direct. J’avais connu pas mal de mec dans ma vie. Des types biens, comme des connards finis. J’en avais pas tiré grand chose juste deux trois trucs d’ordre général sur les mecs. Et ne jamais dire un truc brutalement à un garçon faisait partis de ces choses là. Rare sont ceux qui ont assez de répartis et d’imagination pour répondre avec intelligence. Même les types les mieux en vue ont des difficultés avec la brutalité des mots. En général, ils se contentent de rigoler grassement et finissent par te dire de te tirer en vitesse. C’est de ce genre de trucs que sont capables les mecs.

Et celui là était un peu comme les autres, mais en mieux. Il avait ce truc. Un truc tellement incroyable que je n’ai même pas prêté attention à son rire pathétique :

-Je suis marié.

 Comme si j’allais lui sauter dessus. Il m’a même fais voir son alliance pour me montrer qu’il déconnait pas. Et alors… J’ai rigolé un peu niaisement. Non, en fait c’était tellement niais comme rire que j’ai été surprise de pouvoir faire sortir un son comme ça de ma bouche. Je suis resté les bras comme une conne un long moment mais le type c’est pas cassé pour autant. Il a même cru bon de rajouter, je suis désolé. C’était pas forcement nécessaire, surtout qu’il y avait de grandes chances pour qu’il n’en ait rien à foutre.

 

T’es conne Julie, t’es conne. Vraiment trop conne. Tu peux pas faire attention une fois dans ta vie. Pauvre fille. Allez casse toi !

 Evidement j’ai pas bougé d’un pouce. J’ai même pris le parti de regarder le type. Juste pour lire la déception dans ses yeux. Je suis une fille canon après tout.

Il a les yeux verts ! Des magnifiques yeux verts. Oh lalalalala. Reprends toi ! C’est pas grave c’est que des yeux. Ok des yeux verts magnifiques, mais des yeux quand même.

 Le froid du carrelage commençait à se faufiler au travers de mon collant. J’ai croisé mes bras en posant mes mains sur mes épaules. J’en ai profité pour écraser un peu mes seins. Ca a fait durcir le bout. L’idée est partie de là, comment ce type, tout à fait mignon ok mais aussi tout à fait banal pouvait ne PAS s’intéresser à une nana comme moi. Je veux dire à une nana aussi canon que moi ! Beaucoup de filles n’ont pas conscience de leur pouvoir et c’est pour ça qu’elles en chient. Moi, je connaissais par cœur toutes les ruses.

Je vais le faire baver ce type. Il va voir ce qu’il loupe. Alors mon grand, je te plais ? Tu bandes ? Hein ? Fais voir !

 Evidement, Il s’est cassé et je suis restée comme une conne les bras en croix à côté d’un string rose à diamants. Ecoeurant. Les nanas ne savent plus quoi inventer pour passer la nuit avec un mec. J’ai balancé le string dans mon cadi, à côté de mes chaussures, et je suis aller payer. SLAP SLAP COUIC SLAP SLAP COUIC !

 Au début, j’ai pas accordé trop d’importance à l’épisode du supermarché, c’est après, que ça a commencé à me travailler. J’ai commencé à tilter quand je me suis aperçue que j’avais laissé les courses dans le coffre et je me suis inquiétée quand je me suis rendue compte que cela faisait trois semaines ! La malle arrière puait tellement que j’ai pas eut le courage de virer toutes les merdes qui moisissaient dedans. J’ai juste sauvé le petit string rose d’un magma de tomate banane. Pwoua, cette odeur ! Le truc rose puait carrément et j’ai dût le laver une bonne dizaine de fois pour arrêter le massacre.

Juliejuliejuliejuliejulie. Ca va pas non ? Tu crois pas que t’es un peux bizarre comme nana ? Tu t’es jamais posé cette question ? Non. Et bien tu devrais. Fait moi confiance, t’es complètement à côté e pompes ! Putain Julie merde/tu vas finir chez les barjos si tu continue comme ça/Tu délires à plein tube !

 Tout cela n’avait pas vraiment de sens. Ok je n’avais pas mangé grand chose mais je ne m’étais pas non plus laissé mourir de faim. Après tout, j’avais juste oublié les courses dans le coffre. Certaines personnes seraient aller consulter pour moins que ça. Pour moi, c’était juste un oubli, voilà tout. Pas de quoi s’affoler pour l’instant.

Jusqu’à ce que je retrouve les courses dans mon coffre, je n’avais pas pensé au type du supermarché. Mais depuis, il ne sortait plus de ma tête. A ce moment là, peut être que j’aurai dût me reprendre en main. Je devenais obsessionnelle.

14 février 2008

- Demain c'est l'été -

Si. Hier. J’avais un sac de bille dans les mains. Des bleus, des rouges, des jaunes aussi, des avec pleins de couleurs et quelques-unes plus rares. Tellement de couleurs qu’elles se mélangent quand on regarde dans le noir. Mais Manu il voulait pas me croire.

"Si ! J'te jure ! J'te jure qu's'est vrai ! S'est vrai qu'ca s'mélange ! Ta qu'a d'mander à Martin ! Y va te l'dire lui, Qu'sa s'mélange quand tu les regardes dans le noir." Je lui ai dit à Manu.

-Et comment il était habillé la dernière fois que tu l’as vu ? Hein mon p’tit il portait quoi sur lui ?
-Manu comment il était habillé quand je l’ai vu la dernière fois ?

Du rouge sur les genoux, et sur les joues et puis sur le nez aussi un peu, c'est à cause du soleil. Il parait que c'est l'été. Un matin, maman me met un short. Le même que celui que j’ai mis le jour du baptême d’Henri. C'est mon petit frère. C’est un chieur.

Un matin donc maman m'enfile un short. Toujours le même. Celui en jean coupé "n'importe comment" il dit mon père. Le matin ou maman me met le short elle me dit que c’est l’été aujourd’hui. Alors comme c'est l'été, il faut mettre un short. C’est comme ça. L’été tous le monde met des shorts. Y’a que papa qui en met pas (je crois que je sais pourquoi mais je vous le dirai une autre fois.)

Moi je me dis que peut être c’est parce qu’un jour je mets un short que ça devient l’été. Il faudra que j’essai cet hiver. Il faudra que j’y pense. Le problème c’est que quand il neige j’ai pas envie de mettre de short, rapport au froid.

-Vous croyez que c’est parce que je mets un short que c’est l’été ?

Enfin tous ça pour dire qu’aujourd’hui été ou pas, il fait chaud. Mamie elle dit quand il fait chaud que c'est la canicule. Je trouve que s'est un mot marrant : C-A-N-I-C-U-L-E. C'est un peu comme éjacule. C'est Manu qu'a dit ça un jour. On a tous rigolé quand il a dit ça Manu. Même si je crois qu'on savait pas tous ce que ça voulait dire. Tout façon on s’en fout. 
Toute façon on rigole souvent quand on comprend pas. C'est pour ça qu’on est content d'aller en math avec Manu. On se regarde, même pas très longtemps, et hop on rit. C’est parce qu’on comprend rien à la division. C’est juste des chiffres ou il faut faire pleins de calcule compliqué avant de réussir à trouver (si on c’est pas tromper) le résultat.

-Et Manu dans tous ça, mon p’tit, parle moi de Manu ?

-Manu ?

C'est un chouette copain. C'est dommage qu'il habite loin. Manu il habite dans une grande maison avec des barreaux aux fenêtres et puis une porte en fer toute bleu. Je crois que c'est un château fort. Mais on peu pas rentré dedans : y’a pas de sonnette. On sait, on a cherché un jour avec les copains. Il manquait un joueur pour faire le goal volant. Parce que sinon il s'emmerde celui qu'est dans les cages. S’il est pas volant. Manu il a pas de papa il nous a dit. Il a un éducateur à la place. C’est comme un papa sauf que son travail s’est de faire que tu te lave bien les mains et les dents et les pieds et que tu fais pas de bêtise. Aussi il t’écoute quand t’as des trucs à dire même si c’est des trucs qu’on pas trop d’importance il t’écoute et il dit que c’est « très intéressant ». Moi j’aimerais bien avoir un éducateur, ça doit être cool. Même si mamie elle m’a dit que les éducateurs c’est pour les enfants bizarres et qui font plein de bêtise. Manu il est marrant il fait pas beaucoup de bêtise mais il dit des trucs bizarres. Un jour il a dit qu’il avait mangé son chien parce qu’il avait mangé ses billes. Avec les copains on s’est marré mais on l’a pas cru. C’est pas possible de manger un chien on lui a dit.

-Si ! Bien sur qu’s’est possible de manger un chien ! Il nous a assuré Manu.

Alors, comme on était pas d’accord on a demandé à la maîtresse :

-Madame ? c’est possible de manger un chien ?

-Oui les enfants mais en France ça ne se fait pas. Mais les chinois par exemple mange des chiens.

Alors là on était tous sur le cul ! Manu il avait pas une tête de chinois. La maîtresse elle dit vraiment n’importe quoi des fois.
  

-Mais dit moi mon p’tit. Ton copain Manu, il a jamais fait du mal à quelqu’un ?

-Manu ? euh… Une fois il a tirer les cheveux de Vanessa, la grosse.

Vanessa c’est une grande qu’est grosse. Elle est en CM2. Elle faisait que de dire à Manu que c’était un petit de la DASS. Moi je sais pas ce que ça veut dire mais Manu lui il devait savoir parce qu’il lui a arraché la moitié des cheveux. Comme dans les films avec des cow-boys et des indiens. Il a fait un scalpe et le soir avec les copains on a fait un rituel voodoo avec la touffe de la grosse. Martin il avait piqué le briquet de son père parce qu’il fume la pipe et mon père à moi il fume pas alors… Moi j’ai pris le journal de mot croisé de ma mamie pour faire partir le feu et Manu il avait les cheveux dans sa poche et puis une clope qu’il avait chouré à son éducateur. On a fumé la clope et Martin a dégueulé sur le feu alors il a fallu le rallumer. Après Manu il a dit des trucs marrant sur Vanessa la grosse et moi j’avais la tête qui tourne mais je rigolais trop. Et puis on a fais cramer les cheveux un par un.

-Et justement mon p’tit, Manu, il aimait bien Martin ?

-Bah oui on était dans la même bande. Alors ils étaient obligés sinon la bande elle marche pas. Avant que Manu il partent on avait des codes pour se reconnaître entre membre de la bande. Fallait faire trois bulles de bubble-gum d’affiler et dire le mot de passe.

-Et c’était quoi ce mot de passe, mon p’tit ?

-Vous avez pas l’droit d’le savoir m’sieur.

 Mais la bande c’était comme une autre famille. On pouvait tous se dire. On faisait des missions top secret. On se marrait bien avec la bande. Un jour avec la bande on avait une mission « chourave de cerise chez le père de la ferme à côté de chez Martin. ». C’était des toute rouge. Des griottes.

-T’es un p’tit gars très intelligent Julien. Mais tu sais, tu devrais oublier ton copain Manu parce qu’il a ait quelque chose de pas bien du tout.

-C’est quoi qu’il a fait m’sieur ? Il a encore bouffé un chien ?

-Y’a un peu d’sa mon p’tit. Allez retourne chez ta mère et dis lui bonjour de ma part.

-A mon papa aussi je lui dis bonjour ?

-Non c’est pas la peine juste à ta maman. C’est un mot de passe de la bande des adulte.

-A d’accord comme nous quand avec les copains on disait : Martine a des gros lolos ?

-Oui un peu comme ça, p’tit gars, un peu comme ça… Maintenant file chez toi et oublie Manu.

14 février 2008

- A ta santé la France -

Y’a plus que des dealers de merveilles,

des nabots, des vautours,

L’horizon effondré des joueurs de tambours.

Sur les tables, les dames, nous sourient sans amour

[A ta santé Paris !]

Du profond des faubourgs

Les hoquets haletant, que l’on entend parfois,

Se soulèvent d’un souffle Se répandent impeccables

Sur les routes grandissantes des chemins d’autrefois

Et ça grimpe/grimpe sur les carrousels d’aciers

La jolie rose à fanée, Sous son poids a ployé,

Jusqu’aux sons maladroits des outils improbables

C’est pas faute d’avoir essayé

D’avoir tourné…

Ma langue contre vos langues !

D’avoir retourné, ma langue contre vos langues.

D’essayé de cogner les talents perméables :

Bâtisseurs d’idées,

Rassembleurs de chimère,

Elagueurs de beauté,

Orateurs ratés.

C’est pas faute d’essayer.

[A ta santé Paris !]

On sortira les griffes promet-on, Pauvre chat de gouttière

A l’errance incertaine, on se croira comme hier :

Entre absurde et beauté. Les pieds Sous les tonnelles d’ombres,

Qu’il fait bon s’évader, On se croirait comme hier.

[A ta santé Paris !]

Y’a les acheteurs de merveilles

Qui se pressent alentours

Sur le pavé glacial :

« Faisons vite camarades, retournons à la cour !

 Le labyrinthe s’éveille, s’étire, s’agrandit, s'accentu le dédale ,

la sortie est infime on la croirait

Bancale comme,

 suspendue à tes lèvres ».

[A ta santé La France !]


14 février 2008

- Parresse -

(Apparemment), Je m’en vais me vautrer dans une paresse d’appart
Pathétique petite parcelle de poussière.
Passeras tu tout ton temps à pleurer tout ce temps disparus ?

Ou bien sera tu si subtile, que le secret des sages solitaires te sera légué comme imbus ?

14 février 2008

- L'histoire du prisonnier 1502 -

Ce matin, le soleil tire la gueule. Il fait gris et on attend la neige. Dans la prison de l’Aztrödza on va coudre une langue sur un palais. Voilà ce qui arrive lorsque l’on rit à l’éclat. Dans la cours les détenus sont en cercle, autour de l’échafaud. Tout est calme. Ici, le bruit est bannit. On attend le directeur. Il a le privilège du sang et droit de mort si besoin. C’est toujours ce qui arrive lorsque l’on rit à l’éclat. Le couturier a une main sur le flanc et fume lentement. Deux épaisses colonnes de fumé sortent de ses narines. Il a cette mine mauvaise des gens qui n’ont plus d’âme. Le regard vide, on le croirait mort. De l’échafaud, il sent la force couler dans ses veines. Rien, ne pourrait l’arrêter. Rien. Pas même, ce silence de mort. Pas même, un moindre bruit.

De grandes taches de rouilles parcellent les enceintes. D’en haut, les gardiens surveillent la cérémonie. L’air ravit - eux ; eux ne sont pas aux pieds des murs. En bas, les blouse ternes et cassées des captifs donnent à la scène des allures de décharge. Seul, Seul dans le centre, le couturier se détache par sa toge impeccable.

Un nuage s’écarte et un filet jaune pâle passe sur l’aiguille. Le métal scintille et un frisson court sur le dos du prisonnier 15-02. Il a envi de hurler, de leur dire d’aller se faire foutre. Tout ce silence le rend fou. Complètement fou. Il voudrait entendre les vagues cogner sur une falaise et d’en haut, crier. Crier comme personne n’a jamais crié. Mais il connaît trop les règles, alors, il ne fait que poser ces deux mains, contre sa bouche. Il le fait autant pour étrangler son cri, que pour montrer qu’il ne se laissera pas coudre comme ça. Ces yeux sont rivés sur l’aiguille, ils puent la peur. Il fait non de la tête et, instinctivement, colle sa langue contre son palais, pour voir à quoi cela ressemble. Il imagine le goût du sang dans sa bouche et le son des cris qu’il étouffe. Le frisson revient et lui fait porter son regard sur le sol. Une araignée à six pattes claudique entre les pavés. Il voudrait l’écraser, pas par sadisme mais juste pour entendre le bruit de ces petites pattes se décoller de son corps. Il voudrait l’écraser pour se sentir encore maître de quelque chose. Alors, doucement, le bout de son pied nu s’écrase sur le sol et sans un son, l’insecte agonise en se tortillant entre ses orteils. A cet instant, un sourire de fou s’est accroché sur ses lèvres gercées et quelqu’un, parmi les détenus, retient une vilaine toux. Déjà, les oreilles du couturier se dressent. Ses yeux cherchent, cherchent la gorge responsable. La gorge à trancher…

Dans la prison de l’Aztrödza c’est au silence que l’on doit le plus de respect. La règle est simple : aucun son ne doit parvenir aux oreilles. Aucun. Pas même celui des pas dans les salles communes, pas même celui de l’urine sur l’émail, pas même le ronflement du dormeur, pas même le raclement de gorge du pneumonique. Aucun. A ceux qui rient, on coud la langue, à ceux qui crient on la coupe, à ceux qui toussent on tranche la gorge, à ceux qui pleure on crève les yeux, enfin, à ceux qui émettent le moindre son, ce sont les oreilles que l’on tranche…

Le couturier passe entre les prisonniers, un filet de bave entre les lèvres. Tous baissent la tête, se couvrent la gorge, rêvent à un miracle. Il n’en arrive jamais. Le ciel est de nouveau gris. Opaque. Le directeur arrive, solennel et ivre. Il a le visage qu’on les hommes méchants, les mains croisées dans le dos. Tous ont la tête baissée, comme prête à tomber. Toutes pendent, des gouttes de sève au bout de branches mortes. Une excroissance dont aucun ne sais quoi faire. Le directeur ne les regarde pas. Il n’a que faire de ceux qui respect le silence. Lui, lui ne veut que les troubles fête, ceux que l’on fait saigner. Il marche lentement, sans un bruit. Il a les épaules étroites des dirigeants prétentieux, les pattes de barbes broussailleuses. Certains disent que c’est un ancien pirate que le brouillard ambiant aurait fait échouer sur l’île de l’Aztrödza, brisant son bateau sur les récifs. Voyant sa perte se dessiner, il se serait tiré une balle dans l’oreille, pour en finir. Une bonne fois. Après des mois d’inconscience il serait revenu à lui. Sourd. D’autres prétendent que c’est un fou sadique qui ne trouve son du réconfort que dans le sang et le silence.

Du haut de l’estrade il observe l’assemblé comme on observe des milles pattes. Avec dégoût. Il les méprise autant qu’il méprise les sons. Il leur en veut de trembler face à lui, de suffoquer à l’évocation de son nom. Un jour, il les tuera tous. Il lève la main et, déjà, le couturier s’avance. Quelques flocons gris tombent sur les murs d’enceintes et tous crispent leurs muscles pour ne pas voir leurs mâchoires claquer. Mais c’est leurs squelettes en entiers qui tremblent.

Sur l’échafaud, le détenu 15-02 est assis de force. « ne crie pas/ne crie pas » se répète-t-il, pendant que le directeur lui écarte les mâchoires avec les doigts. « ne cris pas ». Le couturier, enfile le long fil de fer dans le chat de l’aiguille. Tous on la tête baissée. La tige d’acier rentre sous la langue. L’odeur du sang. Elle ressort de l’autre côté. Le goût du métal. « ne crie pas ». La pointe s’enfonce dans le palais. Le fil glisse dans la langue. S’accroche. On tire. « Ne crie pas ». Il crache rouge. Les autres sourient. Ils aiment ça. L’aiguille est dehors, un flocon fond dans sa bouche. Il a le goût du goudron. Le couturier tire sur le fil et le replonge dans la bouche du détenu. Ne pleure pas. Il se souvient. Il se souvient pourquoi est-ce qu’on lui coud la langue. Pourquoi il a rit tout à l’heure. Il n’y avait pas de blague, pas de beauté, pas d’espoir, pas de couleur charmante, pas de femme, pas de rire, pas même une raison de rire. Rien. Tout était terne. Normal. Pas un visage amical. Pas un regard. Pourtant son rire est monté comme un feu d’artifice entre ses dents et il a rit. Rit à l’éclat. Rien ne se prêtait à un sourire. Il trouva cela tellement drôle. Ridicule, risible, tout ça n’avait pas de sens. Il ne sait même plus pourquoi il est ici, à l’Aströdza. Il lui semble qu’il ne l’a jamais su. Le fil ressort de sa bouche. Second point. Il entend encore sa voix. Cette voix, qu’il n’avait pas entendu depuis 23 ans. L’aiguille s’enfonce dans son palais et un torrent visqueux et métallique lui coule dans la gorge. Il crache sans un son. Il a entendu sa voix. Il se la rappelle. Troisième point. Le couturier tire de plus en plus fort. Il veut l’entendre crier. Il ne leur donnera pas cette satisfaction. Il n’a plus besoin, le son de sa gorge est de nouveau gravé dans un coin de son cerveau. La douleur lui pose des voiles transparents devant les yeux. Il regarde la neige et bascule son regard par derrière. Il observe les gardiens, en haut, sous les flocons. Un instant il trouve ça beau et le directeur approche une pince. Quatrième point. Ses yeux brillent comme des sémaphores. Il rompt le fil d’un coup sec et repart, satisfait.

Dans un coin, réconfortante, une gouttière fuit. La langue contre le palais, le prisonnier 15-02 écoute son sang couler sur le pavé. Il ne parlera plus. Mais le silence, doucement, se fait plus amer, plus entêtant. Il a le goût du métal, le goût des chaînes. 

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- Symétries Inversées -
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