Oh la vache la vache la
vache !!!
Il
a tourné la tête vers moi et je me suis planqué dans le rayon bio.
Oh la vache la vache la
vache !!!
J’ai
fais semblant de m’intéresser à un riz équitable hors de prix. J’ai rarement vu
un type qui dégage ça. Merde, comment c’est possible de faire des trucs comme
ça avec des yeux ? Pourquoi je rencontre toujours des types dans des
endroits glauques ? Néons, cadis, produits dégueus dans tous les sens.
Société de consommation de merde !
Tu serais né dans une société de
chasseur cueilleur, c’est dans la forêt que tu l’aurais traqué ton mec. Ca
aurai eut une autre gueule quand même.
Je l’ai suivi
dans le rayon des brosses à dents. Il en a pris une bleue et rouge avec tête
rotative et brosse à langue. Sophistiqué : j’adore. J’ai imaginé sa langue
et sa bouche, je mouillais carrément. La vache ! J’ai pris un truc pas
cher pour me calmer et je me suis envoyé tout le rayon surgelé pour être sur de
pas lui sauté dessus. Il y a certaines situations qu’il ne faut pas sous-estimer.
On peut jamais être complètement à l’abri des ces pulsions embarrassantes. Vous
savez, celles qui vous malmènent par le bout du nez. Je me sentais comme une
ânesse, avec le cul de ce type comme carotte. Parole. Je l’ai rattrapé dans un
rayon de truc de conserve.
Trouve un truc intelligent à lui
dire, trouve un truc intelligent à lui dire !!!
Lui parler, lui parler.
Calmement, ça va bien se passer. T’en a vu d’autre aller, accroche toi. Compte
jusqu’à trois…
Respire…
Voiiiilà. Calme toi…
Respire…
-Salut. Ca roule ?
C’est con ce que tu dis là, complètement
con… Trouve autre chose. Vite. Je réfléchissais à toute allure entre les
conserves de maquereau et les boîtes de thon. Putain d’odeur, j’arrivais pas à
me concentrer sur un truc intelligent. Merde merde merde…
Respire…
J’ai croisé
tous mes doigts entre eux et j’ai eut un mal de chien à les démêler. L’odeur de
poissons me prenait à la gorge et je respirais à toute vitesse pour réussir à
chopper un peu d’air sain. J’étais dans un état pas possible, mes mains étaient
sèches comme des bambous. Je n’arrêtais pas de les tordre comme une damnée.
-Ca va oui. Tu cherche un
truc ?
Oh la vache, oh la vache. Il me
parle. Vite vite répond. Aller !
-Euh non ! non, je cherche
rien de spécial. Je fais mes courses, voilà tout. Enfin, tu vois bien que je
fais mes courses. Hein ? Oui enfin je veux dire on est dans un super
marché. Quoi d’autre ?
Putain, t’es nulle.
-Ok.
Il se casse Il se casse rattrape
Le ! bouge tes fesses !
A
partir de ce jour, j’ai détesté les magasins de bouffe : mes talons
claquaient à toute vitesse sur le carrelage et la roue de mon cadi couinait
sans arrêt. TAC TAC COUIC TAC TAC COUIC TAC TAC COUIC.
Arrête le massacre Julie arrête.
TAC TAC COUIC TAC TAC COUIC
tout le monde te regarde ma fille
arrête tout de suite. Tu vas pas courir derrière un Type dans un super marché.
Quand même…
Et
bien si ! J’ai balancé mes talons dans le cadi et j’ai laissé le chariot
en plein milieu de l’allée.
-Attends ! Attends !
S’il te plaît, attends un peu.
J’ai
rattrapé le mec devant le rayon de lingerie.
Qu’est ce qu’il fout là ?
Peut importe. Concentre toi ma vieille, concentre toi.
-Euh oui attends. En fait si.
D’accord, ok, je cherche quelque chose. Alors voilà, je cherche à attirer ton attention.
Ouais, voilà, tu me plais.
…
C’est
après coup, que j’ai réalisé que c’était un peu direct. J’avais connu pas mal
de mec dans ma vie. Des types biens, comme des connards finis. J’en avais pas
tiré grand chose juste deux trois trucs d’ordre général sur les mecs. Et ne
jamais dire un truc brutalement à un garçon faisait partis de ces choses là.
Rare sont ceux qui ont assez de répartis et d’imagination pour répondre avec
intelligence. Même les types les mieux en vue ont des difficultés avec la brutalité
des mots. En général, ils se contentent
de rigoler grassement et finissent par te dire de te tirer en vitesse. C’est de
ce genre de trucs que sont capables les mecs.
Et celui là
était un peu comme les autres, mais en mieux. Il avait ce truc. Un truc
tellement incroyable que je n’ai même pas prêté attention à son rire
pathétique :
-Je suis marié.
Comme
si j’allais lui sauter dessus. Il m’a même fais voir son alliance pour me
montrer qu’il déconnait pas. Et alors… J’ai rigolé un peu niaisement. Non, en
fait c’était tellement niais comme rire que j’ai été surprise de pouvoir faire
sortir un son comme ça de ma bouche. Je suis resté les bras comme une conne un
long moment mais le type c’est pas cassé pour autant. Il a même cru bon de
rajouter, je suis désolé. C’était pas forcement nécessaire, surtout qu’il y
avait de grandes chances pour qu’il n’en ait rien à foutre.
T’es conne Julie, t’es conne.
Vraiment trop conne. Tu peux pas faire attention une fois dans ta vie. Pauvre
fille. Allez casse toi !
Evidement
j’ai pas bougé d’un pouce. J’ai même pris le parti de regarder le type. Juste
pour lire la déception dans ses yeux. Je suis une fille canon après tout.
Il a les yeux verts ! Des
magnifiques yeux verts. Oh lalalalala. Reprends toi ! C’est pas grave c’est
que des yeux. Ok des yeux verts magnifiques, mais des yeux quand même.
Le
froid du carrelage commençait à se faufiler au travers de mon collant. J’ai
croisé mes bras en posant mes mains sur mes épaules. J’en ai profité pour
écraser un peu mes seins. Ca a fait durcir le bout. L’idée est partie de là,
comment ce type, tout à fait mignon ok mais aussi tout à fait banal pouvait ne
PAS s’intéresser à une nana comme moi. Je veux dire à une nana aussi canon que
moi ! Beaucoup de filles n’ont pas conscience de leur pouvoir et c’est
pour ça qu’elles en chient. Moi, je connaissais par cœur toutes les ruses.
Je vais le faire baver ce type.
Il va voir ce qu’il loupe. Alors mon grand, je te plais ? Tu bandes ? Hein ? Fais
voir !
Evidement,
Il s’est cassé et je suis restée comme une conne les bras en croix à côté d’un
string rose à diamants. Ecoeurant. Les
nanas ne savent plus quoi inventer pour passer la nuit avec un mec. J’ai
balancé le string dans mon cadi, à côté de mes chaussures, et je suis aller
payer. SLAP SLAP COUIC SLAP SLAP COUIC !
Au
début, j’ai pas accordé trop d’importance à l’épisode du supermarché, c’est
après, que ça a commencé à me travailler. J’ai commencé à tilter quand je me
suis aperçue que j’avais laissé les courses dans le coffre et je me suis
inquiétée quand je me suis rendue compte que cela faisait trois semaines !
La malle arrière puait tellement que j’ai pas eut le courage de virer toutes
les merdes qui moisissaient dedans. J’ai juste sauvé le petit string rose d’un
magma de tomate banane. Pwoua, cette odeur ! Le truc rose puait carrément
et j’ai dût le laver une bonne dizaine de fois pour arrêter le massacre.
Juliejuliejuliejuliejulie. Ca va
pas non ? Tu crois pas que t’es un peux bizarre comme nana ? Tu t’es
jamais posé cette question ? Non. Et bien tu devrais. Fait moi confiance,
t’es complètement à côté e pompes ! Putain Julie merde/tu vas finir chez
les barjos si tu continue comme ça/Tu délires à plein tube !
Tout
cela n’avait pas vraiment de sens. Ok je n’avais pas mangé grand chose mais je
ne m’étais pas non plus laissé mourir de faim. Après tout, j’avais juste oublié
les courses dans le coffre. Certaines personnes seraient aller consulter pour
moins que ça. Pour moi, c’était juste un oubli, voilà tout. Pas de quoi
s’affoler pour l’instant.
Jusqu’à ce que je retrouve les courses dans mon coffre, je n’avais pas
pensé au type du supermarché. Mais depuis, il ne sortait plus de ma tête. A ce
moment là, peut être que j’aurai dût me reprendre en main. Je devenais
obsessionnelle.